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Dans l’Évènement syndical paru le 13 janvier 2021, a été publié un portrait du président du POP Valais réalisé par le journaliste Jérôme Béguin. L’article est disponible en suivant ce lien : https://www.evenement.ch/articles/sous-commandant-cousteau. Nous le reproduisons ci-dessous (droits de l’image: Olivier Vogelsang).

Sous-commandant Cousteau

Conducteur de tram, Frédéric Nouchi a contribué à faire renaître le Parti ouvrier et populaire en Valais

«Je suis le fils d’une soixante-huitarde, enseignante et syndicaliste, et petit-fils d’un aiguilleur du rail, communiste et résistant. En plus, je suis né un 1er mai…» Frédéric Nouchi annonce d’emblée la couleur. Ce Français d’origine, conducteur de tram aux Transports publics genevois (TPG), mais résident de Martigny, est l’un des artisans de la renaissance du Parti ouvrier et populaire (POP) en Valais. Nous l’avons rencontré un après-midi alors qu’il finissait son service, commencé ce jour-là à 4h du matin. «Les horaires sont en folie, on tourne comme des hélices, mais c’est un beau métier, cela fait dix-sept ans que je le pratique», explique le wattman à l’arrêt Blandonnet, bonnet rouge vissé sur la tête. «En Valais, on m’appelle le commandant Cousteau», s’amuse-t-il.

Né à Lyon, Frédéric Nouchi a passé une partie de sa jeunesse à Marseille, il a débarqué en Suisse à 20 ans, en 1989, à la recherche d’un travail. Le jeune homme a roulé sa bosse jusqu’en Valais. «J’ai passé toute ma vie au bord du Rhône, c’est mon ancrage.» Il a été disc-jockey à Champéry, a travaillé dans l’hôtellerie, est passé patron, en gérant son propre restaurant à Dorénaz, a ouvert des chambres d’hôtes ou même fait traiteur. «Faire à manger aux gens, c’est leur donner de l’amour, déclare ce membre du comité Slow Food Valais. Je suis aussi un peu le Josef Zisyadis de mon canton.»

Entre Marchais et Coluche

En Valais, on le compare aussi à Jean-Luc Mélenchon. Il assume, même si le fondateur de la France insoumise n’est pas son premier choix. «Jean-Luc est un peu le Napoléon du communisme français. Je me sens plus proche d’un Olivier Besancenot, d’un Philippe Poutou ou d’un François Ruffin. Mes idoles sont Georges Marchais, Coluche et l’abbé Pierre. J’admire ceux qui s’engagent pour les autres. Certains chrétiens m’impressionnent. Pour moi, l’actuel pape est un communiste. Pour reprendre un slogan de Marchais, il faut faire passer l’humain d’abord. Mais plus que les paroles, ce qui compte, ce sont les actes.»

L’homme de gauche commence par prendre sa carte au Parti socialiste du Valais romand. Il devient le président du groupe d’intérêts PS migrants et est élu au Conseil général de Martigny. Mais en 2019, il choisit de quitter le parti à la rose. «Le PS ne défendait pas assez mes idées. J’ai toujours dit que s’il existait un parti communiste, j’en ferais partie.» Ce parti, il va participer à le créer ou plutôt à le relancer.

C’est en 1944 qu’un Parti ouvrier et paysan avait vu le jour dans le Vieux-Pays. «Paysan» plutôt que «populaire» donc, car dès l’origine, le parti est proche des luttes agricoles. Son président d’alors, René-Albert Houriet, est le fondateur de l’Union des producteurs valaisans qui mobilisa 3000 cultivateurs lors des émeutes de Saxon de 1953. Les agriculteurs sont nombreux dans ses rangs, notamment dans le district de Martigny, présidé par René Duchoud. Mais dans les années 1990, le POP valaisan finit par disparaître.

Il est reconstitué en 2019, à l’initiative non seulement de Frédéric Nouchi, mais également d’un professeur de philosophie, penseur et auteur d’essais politiques, Jean-Marie Meilland. «Jean-Marie a semé des graines qui commencent à germer», reconnaît notre interlocuteur. Plusieurs anciens étudiants du professeur retraité ont en effet rejoint la nouvelle formation, qui dénombre une cinquantaine de membres et déjà quatre conseillers généraux élus à Martigny et à Monthey sur des listes communes avec les socialistes. Même si «populaire» a pris la place de «paysan», le POP nouvelle formule n’a pas perdu ce lien à la terre. «Il est important de défendre tous les exploités», dit Frédéric Nouchi, citant l’exemple de travailleurs dans les pépinières qui trimaient plus de seize heures par jour durant le confinement. Le POP envisage d’ailleurs un projet de salaire minimum cantonal qui profiterait en premier lieu aux travailleurs de la terre.

Utopique

Autres points inscrits au programme: une caisse maladie unique, la gratuité des soins dentaires et oculaires, la fusion de l’AVS et du 2e pilier… «Il n’est pas normal de se retrouver avec une retraite de misère après avoir sué sang et eau», estime celui qui s’est aussi beaucoup engagé pour le revenu universel. «C’était utopique, mais ça peut marcher, nous l’avons vu en mars, durant le confinement, l’Etat a dû mettre en place un revenu de base pour soutenir les entreprises et les salariés. Si on avait pu faire passer le revenu de base, nous aurions eu moins de problèmes.»

Pour l’année qui débute, l’un des chevaux de bataille du conseiller général sera de défendre les 25 familles expropriées du camping TCS en vue du développement du Centre d’expositions et de réunions de Martigny. Le popiste évoque des personnes modestes ayant acquis des mobilhomes pour y résider à l’année. «Les gens n’en peuvent plus d’être maltraités, nous allons commencer à avoir des Gilets jaunes en Suisse», pense-t-il. Le Valaisan a suivi des manifestations de Gilets jaunes dans la cité phocéenne. «Je trouve merveilleux cette force révolutionnaire que trouve l’humain quand on lui fait trop mal.»

L’une des tâches présentes de Frédéric Nouchi, élu président du POP valaisan le 12 décembre dernier, est de rassembler des candidats en vue des élections cantonales de mars prochain. «Il est important de voter. Mon grand-père disait que celui qui n’allait pas voter perdait le droit de se plaindre. En dessous de 60% de participation, c’est le patronat et l’extrême droite qui font passer leurs idées. Malheureusement, il devient de plus en plus dur de trouver des candidats qui défendent les droits du peuple. Il ne faut pourtant pas craindre d’affirmer ses idées politiques, de s’engager.» L’étiquette communiste ne lui fait pas peur. «Je ne me considère pas comme marxiste, je ne suis pas trotskiste. Pour moi, le communisme, c’est l’entraide et le partage entre humains.»

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